En juin dernier, lors du précédent contrôle pédagogique de MissPapillon, nous avions eu un désaccord avec un conseiller pédagogique. Ca n'avait pas porté à conséquence, même si c'était évident
qu'il n'avait pas l'habitude d'être contredit... Il vantait les mérites de ce que l'Education Nationale appelle le "tâtonnement". Je lui disais que les cours primaires du CNED (visibles là : académie en ligne) fonctionnent maintenant sur ce principe, que je trouve absurde : on pose à l'enfant un
problème qu'il ne peut pas résoudre avec ses connaissances actuelles, et, en gros, on le laisse se débrouiller. On lui en propose d'autres du même acabit, et on attend en le regardant s'empêtrer.
Finalement, on lui donne la façon de faire (au CNED, c'est sur le ton de "voilà ce que tu aurais dû faire", limite s'il n'y a pas le "espèce d'andouille" dans la
foulée, faut dire que le CNED est rédigé d'une manière toute particulièrement irrespectueuse et crétinisante vis-à-vis des enfants), et on passe à autre chose, paf. Bref : absurde à tous
points de vue (et surtout sur les plans pédagogique et psychologique).
Cependant, comme il ne faut pas mourir bête, j'ai essayé une fois avec MissPapillon. Ben ça a été aussi foireux que le principe est absurde ! Elle a bien fait le cheminement "attendu", mais
chaque fois qu'elle a par la suite été confrontée à la même résolution à faire, elle a dû refaire le même cheminement, elle était devenue incapable de se souvenir directement de son résultat
final précédemment obtenu ! Ca crée un super sentiment d'échec et de perte de temps, une vraie horreur !
Et donc ce monsieur défendait ça à grand coups de "ça a fait ses preuves" (Quelles preuves ? Où ? Avec qui ? Où sont les chiffres ? Cette "réussite" ne correspond
pas à ce que je lis du niveau d'instruction des petits Français à qui on impose entre autres cette méthode depuis quelques décennies... c'est fascinant, les gens pour qui la théorie est
supérieure à la pragmatique, même quand la pratique se plante et replante...).
Autant dire que je n'ai pas été surprise de découvrir, dans les évaluations qu'il avait prévues cette année pour MissPapillon (qu'il m'a remises sans qu'elle les
passe), des "pièges", procédé que je trouve également particulièrement stupide (je crois que c'est André Antibi, au début de La Constante macabre qui
donne comme exemple les cours de secourisme, où on vérifie que les gens ont intégré les choses enseignées, sans chercher à en mettre la moitié en échec par des pièges absurdes, et où on
considérerait à juste titre, si la moitié des candidats n'avaient pas la moyenne, que c'est l'instructeur qui est en échec et non ses élèves... Pourquoi ne raisonne-t-on pas de la même façon avec
les enfants dans les classes ?... enfin bref, c'est un autre sujet).
Et donc ce conseiller était de nouveau là cette année... Et nous avons eu un autre désaccord, mais alors là même pas la peine d'imaginer que j'essayerais d'imposer le truc, même "pour voir". Ces
messieurs parlaient d'une éventuelle rescolarisation future (ce que je ne conteste pas, z'ont bien le droit d'en parler, d'ailleurs monsieur Plouf et moi en parlons
aussi parfois entre nous, c'est dire si le sujet n'est pas tabou), et je disais que je ne pensais pas que dans le cas de MissPapillon et sa très sévère phobie scolaire d'il y a 4 ans, le
collège soit le niveau le plus indiqué pour tenter (violence, compétition, agressivité entre élèves, etc., y sont à leur maximum). A quoi il me répond que
dans la vie, elle sera bien aussi confrontée à des choses dures et violentes, et que, en gros, il faut donc le lui imposer dès que possible pour qu'elle s'y habitue... (et quand on sait ce que SuperKrapou a subi comme harcèlement au collège, ça prend toute sa saveur... Enfin je ne connais pas d'adulte qui subirait la moitié de ça
quotidiennement au boulot sans en faire -et ça serait 100% justifié- tout un flan aux prud'hommes ; mais quand c'est un enfant, on laisse courir, on dit que c'est la vie qui rentre et autres
conneries !!! stupéfiant ! mais ça n'est pas le sujet, je digresse encore).
Ce raisonnement, que j'appelle "mon enfant, dans la vie tu vas en chier, alors commençons tout de suite !", je le trouve particulièrement sadique et hypocrite. Evidemment je ne l'ai pas dit comme
ça à ce conseiller, mais j'ai défendu mon point de vue de manière ferme, il est pour moi absolument inenvisageable de raisonner comme ça.
Pour vous donner un exemple, je pense que tout le monde sera d'accord pour dire qu'on ne met pas un enfant de 3 ans devant un film violent pour adultes sous prétexte qu'il en verra plus tard. Ca
relève exactement du même principe : chaque âge est prêt à un moment pour affronter certaines difficultés (relationnelles ou autre). Ca va même plus loin
puisque chaque individu n'est pas prêt dès bébé à tout affronter, et que tous ne seront pas prêts aux mêmes choses aux mêmes moments, c'est une évidence, alors c'est même ridicule de ne raisonner
qu'en terme d'âge. Pour ma part, par exemple, à presque 40 piges, je ne suis pas capable de lire ou voir des séries/films, etc., qui traitent de torture, fictive ou pas. C'est au-dessus de mes
forces, point. Est-ce que ça me rend moins responsable qu'une autre ? Je ne crois pas, j'aurais même presque tendance à dire au contraire, vu que j'évite les journaux télé, etc., ça m'a donc
permis de ne pas anesthésier mes perceptions émotionnelles et de garder aiguisée une certaine conscience.
Là, le discours était quasi qu'il faudrait entrer dans un moule (encore pour l'instant certainement délétère) sous prétexte que peut-être, plus tard, un jour,
quand elle sera adulte, ce qu'elle aurait à subir dans ce moule maintenant pourrait se reproduire ailleurs ? Gné ?! Vous étiez capable d'affronter les mêmes choses, voire pire, à 10 ans
qu'aujourd'hui, et sans dommages à long terme, vous ? Moi pas.
Alors même si j'ai été super contente de ce contrôle pédagogique (où, même sur ce sujet, chacun a pu donner son point de vue sans être interrompu et sasn que ça
tourne au pugilat, ce qui déjà en soi est remarquable), d'un autre côté je me dis aussi que décidément, je suis plutôt contente de ne pas confier mes enfants à des gens qui ont de tels
raisonnements (ou pas, c'est la roulette, et c'est bien ça une partie du problème !)...