Monsieur Tanner, réalisateur de documentaires animaliers, hérite une maison délabrée sise à Toulouse d'un vieil oncle. Il accepte l'héritage et vend sa propre maison. Commence alors le long défiler des professionnels de tous les corps de métiers qui vont l'aider à rénover la maison... Les marioles, les compétents à côté de leurs pompes, les showmen qui se rêvent droit sortis de Vegas, celui qui parle comme un livre, celui qui pleure sur son épaule, les menteurs, les étourdis, les fainéants, etc., tous aux noms comme seul Dubois sait les inventer (Chavolo Bitz, Pedro Kantor, Pierre Sandre, Dorado Durango, Igor Zeitsev, Jean Goujon, Roy et Zigfried, Adrien Simkolochuski, Emile Harang, Pierre Coty, etc.).
Un an de travaux, quelques beaux specimens, quelques belles histoires et anecdotes... et une maison finalement habitable.
Ce livre est une galerie de portraits plus vrais que nature désopilante, il y a très longtemps que je n'avais pas ri à ce point en bouquinant, éclats de rire quasiment à chaque chapitre ! J'aurais dû noter chaque intervenant, pour les retenir dans l'ordre et sans oubli, parce que vraiment ça vallait le coup ! Je ne peux que vous conseiller ce Dubois bien différents des autres, plus concis (uniquement des chapitres courts, de 1 à 3 pages), moins existentiel, plus concret, factuel, descriptif. A pleurer de rire !
Ce qui n'empêche pas des scènes pathétiques, des regrets poignants et des moments de grande solitude très bien exprimés.
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Feuilletons ensemble quelques extraits :
incipit : Rien ne me prédisposait à me retrouver ainsi mêlé à de pareilles histoires.
page 78 : On ne possède jamais une maison. On l'occupe. Au mieux, on l'habite. En de très rares occasions, on parvient à se faire adopter par elle.
pages 81-82 : Outre leur charabia, Chavolo et Dorado avaient une autre particularité. Ils parlaient d'eux-mêmes à la troisième personne. Cela donnait parfois des dialogues ahurissants.
- Il est content du travail de Chavolo ?
- Pour l'instant, pas de problème.
- Bon. Mais s'il y a quelque chose qui ne va pas, qu'il n'hésite pas à en parler. Chavolo préfère qu'on lui dise les choses en face plutôt que de les apprendre par derrière.
- Les plafonds, vous allez tous els refaire en BA13 ?
- Il a une autre idée ? Non ? Parce que Chavolo préfère. Il monte des rails et ensuite, avec Dorado, il visse les plaques dessus. Ca va plus vite.
- Vous avez assez de matérieux ?
- Non. Justement, il va aller en prendre d'autres. Il a un fournisseur préféré ?
- Qui ?
- Ben lui.
- Vous voulez dire moi ?
- Il voit quelqu'un d'autre dans la pièce ?
page 85 : - Il a fini la salle de bains. Il veut venir voir ?
- J'arrive Chavolo.
- Voilà. Il a pris sur lui d'habiller le tuyau de descente. C'est mieux, non ?
Et là, sans doute victime du mimétisme, je m'entendis répondre :
- Il a bien fait. Il l'a réussi. C'est une très bonne idée.
- Il était sûr que ça lui plairait.
pages 92-93 : clic pour agrandir
page 125 : Souvent je me suis posé la question de savoir s'il n'y avait pas quelque chose qui clochait chez moi. Il n'était pas normal d'attirer à ce point les ennuis et les canailles.
page 132 : Après le moment de flottement et d'émotion que nous avions traversé ce matin, la vie retrouvait son cours normal et nous, nos places respectives. Moi, dans la peau du pigeon éternel, Simko, dans celle du chasseur contraint de me tirer dessus pour se nourrir.
page 137 : A endurer pareilles tortures, on perd très vite ses forces, sa santé, aussi bien mentale que physique, ses économies, sa lucidité, bref, sa raison.
page 188 : Je pense que l'esprit de Pierre Coty était une sorte de bonde dépourvue de bouchon. Celle-ci canalisait et enregistrait les informations, mais, faute d'accessoire approprié, les laissait filer vers l'égoût de l'oubli.
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Vous plaisantez, Monsieur Tanner, Jean-Paul Dubois, 199 pages, 2006